DEBAT
"l'homoparentalité"
Par souci d'anonymat, tous les prénoms ont été
changés.
Jean : J'ai eu un ami pendant 17 ans. Cet ami a rencontré
une jeune femme avec qui il a eu 2 enfants. Nous vivions tous les trois
ensemble dans une maison que nous avions fait construire. Au bout de 6
ans, mon ami est mort. Je me suis retrouvé sans rien, avec l'impossibilité
de revoir ces deux enfants que j'avais élevés depuis leur
naissance. Ces fut un déchirement de les perdre de vue aussi brutalement.
Depuis je les vois rarement, le plus souvent pas le biais d'Internet,
sur MSN.
Florent : On voit dans ton histoire qu'il n'y a pas que
les liens du sang qui importent.
Jean : Le lien qui importe est celui de l'amour. J'ai
pris conscience qu'un homo comme moi pouvait être un père
aussi bon que n'importe quel parent.
René : J'ai eu un fils qui a maintenant 19 ans.
Au départ, je ne souhaitais pas spécialement en avoir un.
Finalement, j'en suis heureux et c'est le seul bonheur qui me reste de
cette période de ma vie d'homme marié.
Parmi
ceux qui n'ont pas d'enfants, quels sont ceux qui ont un désir
d'enfant ?
Sylvain
: Il faut l'envisager avec quelqu'un de stable, à deux.
Adeline : En ce qui me concerne, pas dans l'absolu.
Florent : Pour moi, je ne conçois pas d'avoir
un enfant seul. On a besoin d'être deux.
Sophie : Un enfant, oui, mais je ne veux pas le porter.
Ce serait ma copine qui le porterait.
Lucie : Oui, je l'ai eu il y a quelque temps. Puis le
désir s'est estompé.
Florent : Comment l'aurais-tu fait ?
Lucie : Certainement par insémination artificielle.
Quelle
position, quels droits pour ceux qui entourent l'enfant ?
Brigitte : Pour un couple de femmes, se pose la question
du père. Doit-il être inexistant ou avoir une place dans
la vie de l'enfant ? Le père voudra-t-il ou non reconnaître
l'enfant ?
Jean : Si vous avez un enfant et l'élevez seules
sans père, quels besoins aura-t-il plus tard ?
Sylvain: Il importe que dans ce cas, la situation soit
claire, pas trop conflictuelle. Un enfant peut vivre bien en dehors de
lien père-mère. Dans la première moitié du
20e siècle, parfois à cause des guerres, les familles étaient
plus élargies ; certains enfants étaient élevés
par des tantes ou les grands-parents sans que cela paraisse anormal. Actuellement,
on est plus dans le droit qui tend à rendre artificiel ce qui est
naturel.
Jean
: Imaginons que deux femmes ont un enfant. La mère biologique de
l'enfant meurt et son père le reconnaît. Qu'advient-il de
l'autre mère ?
Adeline
: Elle se retrouve rejetée sans droits. C'est pourquoi les associations
revendiquent l'existence d'un lien d'engagement entre les deux personnes
qui élèvent l'enfant.
Jean : alors, c'est plus simple d'avoir un enfant seul
…
Adeline : deux, et pourquoi pas trois, voire quatre (2
gays et deux lesbiennes) ?
Sylvain: Cela ne simplifie pas les choses pour la législation.
Les association ne devraient-elles pas demander quelque chose de plus
simple ?
Adeline : Les associations avancent deux théories.
La première est celle de l'APGL (Association des Parents Gays et
Lesbiens) : elle revendique des loir pour la reconnaissance des couples
homosexuels. D'autres associations revendiquent une évolution de
la parentalité et cherchent comment reconnaître ces modes
de parentalité au niveau de la loi. Le réflexion va au-delà
des seuls couples homos et des familles recomposées.
Jean : Les enfants ont déjà du mal à
s'y retrouver d'une famille à l'autre (homo ou non) alors qu'en
est-il dans une famille composée de deux gars et deux filles !
Adeline : En général, les parents vivent
et s'organisent dans l'intérêt de l'enfant. Il y a des moments
dans la vie où l'on ne choisit pas.
Jean : Comment les enfants vivent-ils tout cela ?
Florent : Les problèmes arrivent aussi pour d'autres
couples ordinaires.
Jean : Oui mais là, les problèmes sont
là dès le départ.
Florent : Le jour où je serai en couple, je voudrais
lancer une procédure d'adoption en tant que célibataire.
Sylvain: Mais il y aura une enquête sociale et
ce ne sera pas possible.
Adeline : Les assistantes sociales peuvent fermer les
yeux mais au niveau des associations et des pays d'où viennent
les enfants, l'acceptation sera plus difficile.
Florent : Le fait d'avoir un enfant et de ne pas l'élever
est aussi envisageable.
Lucie : Jean , tes deux filles savaient-elles qui tu
étais par rapport à ton ami?
Jean : Elles ne savent pas. On ne leur a pas dit.
Florent : Peut-être ne se posent-elle pas la question.
Jean : L'une a demandé à sa grand-mère
qui j'étais pour son papa.
Sylvain: Lorsqu'il y a des questionnements, c'est moins
au sein de la famille que dans l'entourage.
Jean : Je ne suis pas très favorable à
avoir un enfant pour un homosexuel parce que je pense à l'enfant
et actuellement, le climat n'est pas très favorable… Dans
les années 60, c'était autre chose …
Adeline : L'égalité est fondamentale. Il
est important qu'on ait les mêmes droits.
Brigitte : On réfléchit plus et trop par
rapport aux couples hétéros qui ne se posent pas toutes
ces questions.
Florent : C'est bien qu'il y ait des gens qui bougent,
qui fassent avancer le choses, qui montrent que cela est possible et que
ces enfants sont tout à fait normaux.
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